Association Nationale des Officiers en Retraite
Extrait du bulletin n° 2 de novembre 1913
Note du Président de l’Association dédiée aux Officiers de l’armée d’active
Utilité d’un Groupement professionnel pour le Relèvement moral et matériel de l’État des Officiers
A messieurs les officiers en activité et en retraite.
En ouvrant la séance de la réunion trimestrielle, le Président de l’Association prononce l’allocution suivante :
Nous lisons dans un projet de relèvement des soldes déposé par plusieurs députés, le considérant suivant :
« Tandis que les autres fonctionnaires ont obtenu à chaque loi de finances, grâce aux efforts persévérants de leurs Associations, les relèvements de traitement ou les indemnités supplémentaires reconnues nécessaires, les officiers, privés des avantages des groupements professionnels, attendent de la seule générosité gouvernementale des améliorations matérielles qui n’arrivent jamais. Ils se découragent.»
La grande famille des officiers de carrière comprenant 58.000 membres : 40.000 en activité, 18.000 en retraite, est en effet restée longtemps réfractaire à l’évolution sociale qui a poussé toutes les Corporations de fonctionnaires et de magistrats à fonder des Associations pour la défense de leurs intérêts. Il lui manquait la formule pouvant concilier la discipline militaire avec les intérêts professionnels.
Les officiers en retraite ont trouvé celle formule. Sous le couvert de la loi du 1er juillet 1901, ils ont créé une Association, dont la légalité est incontestable puisque les Ministres compétents ont autorisé les officiers en activité à en faire partie, sous la réserve qu’ils ne pourront y exercer aucune fonction administrative.
Complètement dégagée de toute préoccupation politique ou confessionnelle, respectueuse envers le gouvernement du pays, très déférente envers les autorités militaires et maritimes, l’Association a déclaré dans ses statuts qu’elle ne s occuperait jamais de questions politiques ou religieuses non plus que de discipline militaire.
Elle entend rester exclusivement sur le terrain des revendications professionnelles, consacrer ses efforts à assurer aux officiers et à leurs veuves une aisance relative et une dignité de vie compatible avec leur situation sociale.
Elle recherche pour l’officier la juste part de considération qui lui est légitimement due.
Donnant à la France toute son intelligence, toute son énergie physique et morale, toujours prêt aux plus généreux et aux plus héroïques sacrifices, l’officier a droit au respect de tous les citoyens.
Véritable clef de voûte de nos armées, apôtre du culte du drapeau, défenseur de l’honneur national, l’officier doit occuper le rang auquel l’appelle sa noble mission.
L’A.N.O.R. se compose exclusivement d’officiers de carrière :
D’abord, les retraités, qui remplissent le rôle actif, parce seuls parmi les officiers ils possèdent toutes les prérogatives du citoyen — droit de parler, d’écrire, de voter, de s’associer, etc.
Ensuite, les officiers en activité, autorisés par les Ministres compétents à en faire partie, en qualité de membres honoraires.
L’organisation de l’Association est la suivante :
Chaque département forme un groupement de l’Association comprenant tous les officiers en activité et en retraite du département.
Les officiers du Gouvernement militaire de Paris forment un groupement chargé de fournir le Conseil d’administration central de la Société.
Ce Conseil, composé de 18 officiers en retraite, de toutes les armes et services, est actuellement le suivant :
MM. BREYNAT, commandant d’infanterie, président, 9 bis, rue du Sud, Versailles.
GABRIELLI, commandant de cavalerie, vice-président, 62, rue du Ranelagh, Paris,
BUISSON, lieutenant colonel d’artillerie breveté, secrétaire général, 33, avenue Henri-Martin, Paris.
BRETON, capitaine d’artillerie, trésorier, 20, avenue de Saint-Cloud, Versailles.
ANDRÉ, médecin principal de 1ère classe, 27, rue de Beauvau, Versailles.
MM. BERGER, officier d’administration de 1ère classe, 64, rue de Clignancourt, Paris.
BONTEMPS, commandant du train des équipages militaires, 10, rue Hoche. Versailles.
BOUTIN, commandant d’infanterie coloniale, 15, rue Perdonnet, Paris.
BROCHET, commandant d’infanterie, 5, rue Montbauron, Versailles.
CASENAVE, officier d’administration principal, 4 bis, rue Mertens, Bois-Colombes.
CHEVILLE, commandant d’artillerie, 50, avenue du Chemin-de-Fer, Colombes.
DEVITERNE, lieutenant-colonel d’artillerie coloniale, 19, avenue Félix-Faure, Paris.
DOURCHES, colonel de gendarmerie, 18, rue Montbauron, Versailles.
DUVIVIER, commandant du génie, 18, rue de Staël, Paris.
GAUTHIER, lieutenant de vaisseau, 41, avenue de Balzac, Ville-d’Avray.
GIRARDIN (de), commandant de cavalerie, 11, rue Colbert, Versailles.
MANTIN, commandant d’infanterie coloniale, 127, boulevard Saint-Michel, Paris.
PUTHOSTE, vétérinaire principal, 110, rue Denfert-Rochereau, Paris.
Les fonctions des Membres du Conseil d’administration sont absolument gratuites.
Tous les Groupements départementaux se réunissent en un Congrès annuel, à Paris, pour discuter les intérêts de la Corporation. Au Congrès tenu en avril 1913, 60 Groupements étaient représentés.
La direction et l’action sociale appartiennent donc aux Anciens. A eux la défense des intérêts de la Corporation.
Mais si les règlements militaires ne permettent pas aux officiers en activité de participer à l’Administration sociale, ils ont le droit de faire partie de toutes les Commissions organisées par l’Association pour étudier les solutions à présenter aux pouvoirs publics, pour résoudre toutes les crises qui pèsent sur l’armée. Nos camarades actifs qui voudraient faire partie de ces Commissions sont priés de le faire connaître au Président de l’Association, 9 bis, rue du Sud, à Versailles. Les Commissions se réunissent à Paris, rue Saint-Honoré, 163, place du Théâtre Français.
En collaborant avec leurs aînés, ils auront la faculté de faire connaître leurs desiderata et de participer à la solution Je toutes les questions auxquelles jusqu’à ce jour ils n’ont pu prendre une part directe, notamment :
Recrutement des officiers. Avancement. Soldes. Retraites. Statuts des officiers. Mariages. Emplois civils de l’Etat à réserver aux officiers. Maintien de la carte d’identité à l’officier retraité, devenu par la loi de 1878 un officier à la disposition du Ministre de la Guerre. Abrogation de la loi sur le Cumul, ou élévation du chiffre du traitement civil avec lequel la pension de l’officier peut se cumuler. Honneurs et préséances. Rang des officiers. Nos colonels ne doivent pas s’incliner devant des sous-préfets, etc.
C’est donc un vaste champ d’études qui se présente à tous nos camarades.
Pour que toutes ces questions soient résolues au mieux des intérêts des officiers, l’Association les poursuivra énergiquement auprès des pouvoirs publics qui ont entre leurs mains les solutions indispensables pour les faire aboutir.
Mais pour que ses efforts soient couronnés de succès, il est nécessaire que l’A.N.O.R. représente la majorité des officiers.
Que nos jeunes camarades n’oublient pas que de nos jours l’isolement est synonyme d’impuissance, que toute corporation qui abandonne la défense de ses droits marche à la déchéance. L’expérience a été faite, ne la continuons pas.
C’est à la génération actuellement sous les drapeaux qu’il appartient de réaliser l’effort indispensable pour fonder un puissant groupement professionnel chargé de la défense des intérêts de la Corporation. Nous faisons donc appel à tous nos camarades et les prions de nous apporter leur concours, l’appui de leur nombre. Nous serons reconnaissants à tous ceux qui voudront bien accepter le litre de délégué régimentaire de l’Association, lequel ne comporte d’autres charges que de recueillir des adhésions parmi leurs camarades des corps et services et de les adresser au Siège social.
En présence de notre loyalisme, de la déférence que nous conserverons toujours envers les pouvoirs publics, aucune considération ne doit empêcher nos jeunes camarades de se joindre à nous. Au point de vue disciplinaire, ils sont couverts par les autorisations ministérielles. Au point de vue des avantages qu’ils peuvent en retirer, nos députés leur ont démontré que l’Association est l’arme la plus efficace pour faire aboutir les revendications d’une Corporation.
En faisant acte d’adhésion à notre Société, un grand nombre d’officiers actifs nous écrivent : L’A.N.O.R. a trouvé la solution d’un problème difficile : Concilier les intérêts de la discipline militaire avec la défense des intérêts professionnels. Nos Anciens ont l’ait œuvre très utile; elle peut rendre les plus grands services aux officiers, nous devons tous la soutenir.
En obtenant pour les officiers de carrière la possibilité de s’unir, nous avons franchi une étape considérable; nous avons fait passer ce qui semblait être le domaine du rêve dans celui des réalités vivantes. Des espoirs plus grands ne sont-ils pas permis? Les officiers en activité ne peuvent-ils espérer qu’un jour viendra où ils auront, comme les fonctionnaires civils, le droit de participer à l’administration de l’Association qui prendra alors pour titre : Association Nationale des Officiers.
Une délégation composée de 15 membres de notre Association : 2 colonels, 3 lieutenants-colonels, 5 commandants et 5 capitaines, présentait le 17 avril dernier, aux Ministres, les vœux émis par notre Congrès pour le relèvement des soldes el des retraites.
Des projets ont été présentés pour les soldes, mais ils n’ont pas rencontré dans le Gouvernement el le Parlement l’unanimité pour qu’ils aboutissent immédiatement.
Si notre délégation avait pu dire : Nous vous apportons les vœux formulés par 30.000 officiers en activité, c’est-à-dire par la grande majorité de ceux qui sont le cœur el le cerveau de notre armée. En leur nom nous vous prions de relever leur situation. C’est une mesure de salut national. Il faut qu’elle soit solutionnée promptement. Coûte que coûte des mesures auraient été arrêtées par le Gouvernement. Les difficultés budgétaires soulevées par le Ministre des Finances auraient cédé le pas à la défense nationale. Les nouveaux tarifs auraient été volés avant les vacances du Parlement. Nous les attendons toujours.
Malheureusement notre délégation ne s’appuyait encore que sur 8.500 officiers, dont 3.300 en activité. Que nos jeunes camarades viennent donc à nous; qu’ils nous apportent l’appui du nombre pour le triomphe de tous nos desiderata.
Des retraites.
La vie de l’officier ne se termine pas avec sa période d’activité. Il y a la retraite, comprenant pour la moyenne des officiers une période de dix-huit ans.
Ce sont les années les plus pénibles à traverser pour l’officier. C’est l’âge où les difficultés de l’existence sont les plus grandes.
Avec les taux actuels ce sont « les années maigres », durant lesquelles l’officier n’a pas la possibilité de faire vivre sa famille honorablement ni d’élever ses enfants.
Notre dernière loi sur les pensions remonte à 1878. Celle du 13 juillet 1911, qui a fixé de nouveaux tarifs pour les lieutenants et les capitaines, n’a été qu’une mesure incomplète et injuste. Elle aurait dû appliquer à tous les officiers – du sous-lieutenant, au colonel – la volonté formulée par le législateur de 1878, c’est-à-dire fixer le taux des pensions sur les deux tiers de la solde. Le capitaine, après douze ans de grade, aurait dû voir son minimum fixé à 3.576 francs et non à 2.900.
En cette circonstance, comme en beaucoup d’autres, les intérêts des officiers n’ont pas été défendus. Aucune voix ne s’est élevée pour protester contre l’injustice dont les officiers étaient les victimes. Contrairement aux précédents législatifs rien n’a été prévu pour l’assimilation des nouveaux tarifs aux retraités d’ancien régime. Bien que depuis 1878 la cherté de l’existence ait augmenté de cinquante pour cent, les anciens retraités doivent toujours vivre avec des tarifs remontant à trente-cinq ans.
Que tous nos camarades qui connaissent les privations courageusement supportées par leurs aînés se joignent à nous pour nous aider à les faire disparaître. Qu’une poussée formidable d’adhésions vienne affirmer que la grande corporation des officiers de carrière a l’intention de défendre elle-même ses intérêts et ses droits trop longtemps méconnus.